Copropriété : emprunt collectif à adhésion automatique
N° 2025-15 / À jour au 31 juillet 2025
Loi n° 2024-322 du 9.4.24 : art. 4
Décrets n° 2025-499 du 6.6.25 et n° 2025-711 du 25.7.25
Afin de faciliter la rénovation des copropriétés, la loi “Habitat dégradé” du 9 avril 2024 a créé un nouvel emprunt collectif à adhésion automatique pour le financement de travaux en copropriété (cf. Analyse juridique n° 2024-15).
Deux décrets d’application, permettant le déploiement de ces prêts collectifs, ont été publiés :
- le décret du 6 juin 2025 relatif aux informations à fournir par le syndic à l’établissement prêteur ;
- le décret du 25 juillet 2025 relatif aux prêts collectifs et aux modalités d’intervention du Fonds de garantie pour la rénovation (FGR).
La publication de ce dernier décret permet aux établissements bancaires, depuis le 28 juillet 2025, de mettre en œuvre cet emprunt collectif.
Régime juridique de l’emprunt collectif
Pour mémoire, la copropriété peut souscrire un emprunt collectif, au nom du syndicat des copropriétaires, afin de financer la réalisation de travaux. Avant la loi Habitat dégradé, l’emprunt collectif pouvait être souscrit :
- au bénéfice de l’ensemble des copropriétaires, et adopté à l’unanimité des copropriétaires en Assemblée générale (AG) ;
- au bénéfice de l’ensemble des copropriétaires et adopté à la même majorité que celle nécessaire au vote des travaux lorsqu’il a pour objectif de financer des travaux de rénovation énergétique et qu’il s’agit d’un prêt à taux zéro ;
- au bénéfice des seuls copropriétaires décidant d’y participer et adopté à la même majorité que celle applicable au vote des travaux qu’il permettra de financer.
La loi Habitat dégradé a assoupli les conditions dans lesquelles l’AG peut décider de souscrire un emprunt collectif remboursé par l’ensemble des copropriétaires. Ce nouvel emprunt collectif est appelé "prêt collectif à adhésion automatique".
Souscription de l’emprunt et conditions de participation
(loi du 9.4.24 : art. 4 et décret du 25.7.25 : art. 1er / loi du 10.7.65 : art. 26-4 et 26-9 à 26-13 et CCH : L.732-2 et R.732-1 [nouveau])
La loi Habitat dégradé prévoit qu’un emprunt peut être adopté en AG, à la même majorité que celle applicable au vote des travaux qu’il permettra de financer (et non plus à l’unanimité), lorsque ces travaux sont :
- nécessaires à la conservation de l'immeuble, ainsi qu'à la préservation de la santé et de la sécurité physique des occupants; il s’agit notamment des travaux permettant d'assurer la mise en conformité des logements avec les normes de salubrité et de sécurité (loi du 10.7.65 : art. 24, II, a) ;
- rendus obligatoires en vertu de dispositions législatives ou réglementaires ou d'un arrêté de police administrative relatif à la sécurité ou à la salubrité publique, notifié au syndicat des copropriétaires pris en la personne du syndic (loi du 10.7.65 : art. 24, II, b) ;
- des travaux de restauration immobilière (notifiés en vertu de l'article L.313-4-2 du Code de l'urbanisme), notamment les travaux portant sur des parties privatives dont le syndicat des copropriétaires décide d'assurer la maîtrise d'ouvrage (loi du 10.7.65 : art. 24, II, c) ;
- des travaux d'accessibilité aux personnes handicapées ou à mobilité réduite, sous réserve qu'ils n'affectent pas la structure de l'immeuble ou ses éléments d'équipement essentiels (loi du 10.7.65 : art. 24, II, d) ;
- des travaux de suppression des vide-ordures pour des impératifs d'hygiène (loi du 10.7.65 : art. 24, II, e) ;
- des travaux d'économies d'énergie ou de réduction des émissions de gaz à effet de serre (loi du 10.7.65 : art. 25, f).
Ce prêt permet de financer le coût des travaux non couverts par la mobilisation de fonds détenus par le syndicat des copropriétaires ou le coût des travaux éligibles à l’éco-PTZ Copro (CGI : art. 244 quater U, cf. Analyse juridique n° 2019-15).
Chaque copropriétaire est réputé avoir accepté de participer à cet emprunt, à moins de s’y opposer expressément. Pour refuser de participer au remboursement de l’emprunt voté dans ce cadre, le copropriétaire doit le notifier au syndic dans un délai de deux mois à compter de la notification du procès-verbal de l’AG. Il doit également verser la totalité de la quote-part du prix des travaux lui revenant dans un délai de six mois à compter de la notification de ce procès-verbal. À défaut, le copropriétaire sera tenu par l’emprunt.
Les sommes dues par le copropriétaire ayant refusé de participer à cet emprunt correspondent au remboursement du capital et des intérêts et au paiement des frais et des honoraires. Elles entrent définitivement, dès leur versement, dans le patrimoine du syndicat des copropriétaires et seront affectées sans délai par le syndic au remboursement anticipé de l’emprunt.
Fixation de la durée du prêt collectif à adhésion automatique
(décret du 25.7.25 : art. 1er / CCH : R.732-1 [nouveau])
Pour que ce prêt collectif à adhésion automatique soit mis en œuvre, la loi prévoyait que la durée pour laquelle il pourra être souscrit devait être fixée par décret. C’est l’objet du décret du 25 juillet 2025 qui fixe la durée maximale du prêt collectif à adhésion automatique à 25 ans.
La publication du décret du 25 juillet 2025 ouvre donc la possibilité, depuis le 28 juillet 2025, aux établissements bancaires de mettre en œuvre cet emprunt collectif.
Conditions de distribution du prêt
(loi du 9.4.24 : art. 4, I et IV / loi du 10.7.65 : art. 26-4 et art. 26-12 [nouveau] / C. conso : L.751-2 et L.751-3)
L’établissement prêteur peut demander au syndic de lui fournir les informations relatives au syndicat des copropriétaires nécessaires, suffisantes et proportionnées, afin d’apprécier la capacité du syndicat à remplir ses obligations définies par le contrat de prêt.
Les conditions de mise en œuvre de cette demande devaient être définies par décret. C’est l’objet du décret du 6 juin 2025 qui définit la liste des documents devant être transmis par le syndic à la demande de l’établissement prêteur dans le cadre du dossier de demande de prêt collectif.
Informations à transmettre à l’établissement prêteur
(décret du 6.6.25 : art. 1er)
Pour l’instruction de la demande de prêt, le syndic doit remettre à l’établissement prêteur les documents suivants :
- pour les documents relatifs à l’organisation de l’immeuble :
- le règlement de copropriété, l'état descriptif de division ainsi que les actes les modifiant, s'ils ont été publiés ;
- la fiche synthétique de la copropriété, comportant notamment le numéro d'immatriculation du syndicat des copropriétaires, à jour à la date de dépôt de la demande de prêt ;
- les procès-verbaux des assemblées générales des trois dernières années, à la date de dépôt de la demande de prêt, et les annexes correspondantes, à l'exception des listes individualisées et nominatives ;
- une attestation d'assurance de dommages couvrant les parties communes de l'immeuble pour l'année en cours, si une telle assurance a été souscrite ;
- les informations financières suivantes à jour à la date de dépôt de la demande de prêt :
- le montant des sommes présentes sur le compte bancaire séparé ouvert au nom du syndicat des copropriétaires ;
- le montant de la dette du syndicat vis-à-vis des fournisseurs, le taux des impayés de charges au sein du syndicat des copropriétaires et les informations non nominatives suivantes (le nombre de copropriétaires en situation d'impayés, le montant des impayés de chaque copropriétaire, l'ancienneté de la situation d'impayés de chaque copropriétaire) ;
- pour les immeubles dont la réception des travaux de construction est intervenue depuis au moins 10 ans, le montant des sommes disponibles sur le compte bancaire dédié au fonds de travaux ;
- le programme des travaux envisagés et les devis associés ainsi que les modalités prévisionnelles de son financement ;
- les noms et prénoms complets ainsi que le lieu et la date de naissance de chaque copropriétaire personne physique, y compris les copropriétaires indivisaires, chaque copropriétaire étant tenu de fournir ces informations au syndic qui lui en fait la demande ;
- le cas échéant, les tableaux de remboursement des autres prêts collectifs souscrits par le syndicat, en cours de remboursement.
Cette mesure est entrée en vigueur le 8 juin 2025.
L’objectif de cette vérification est de permettre aux banques d’acquérir une juste vision du risque afin de ne prêter qu’à des personnes en capacité de rembourser et de ne pas contribuer à leur surendettement, comme c’est le cas dans le cadre d’un crédit à la consommation ou d’un crédit immobilier (cf. amendement n°162).
Par ailleurs, avant d’accorder l’emprunt, l’établissement prêteur peut consulter le Fichier national des incidents de remboursement des crédits aux particuliers (FICP) (C. conso : L. 751 1), dans les conditions prévues par l’arrêté du 26 octobre 2010 (C. conso : L. 751 6), sans préjudice de la vérification de la solvabilité des copropriétaires qui participent à l’emprunt.
Garantie du prêt
(loi du 9.4.24 : art. 4 / loi du 10.7.65 : art. 12)
Le syndicat des copropriétaires est garanti en totalité, sans franchise et sans délai de carence, par un cautionnement solidaire, qui peut être mis en œuvre après constat de la défaillance d’un copropriétaire bénéficiant de l’emprunt pour les sommes correspondant à son remboursement ainsi qu’au paiement des accessoires.
Le cautionnement solidaire doit résulter d’un engagement écrit fourni par une entreprise d’assurance spécialement agréée, par un établissement de crédit, par une société de financement ou par le Trésor public, la Caisse des dépôts et consignations (CDC) ou La Poste (Code monétaire et financier : L.518-25).
L’organisme de caution peut également consulter le FICP.
Après sa mise en œuvre, la caution peut être subrogée de plein droit dans l’exercice de l’hypothèque légale du syndicat des copropriétaires.
Conditions de mise à disposition des fonds empruntés
(loi du 9.4.24 : art. 4, I / loi du 10.7.65 : art. 26-9)
Les fonds empruntés dans le cadre de cet emprunt collectif à adhésion automatique doivent être versés par l’établissement prêteur sur un compte bancaire séparé et réservé à cet effet.
Ce compte bancaire permet également le versement des subventions publiques accordées au syndicat des copropriétaires pour le financement des travaux à réaliser et des sommes versées par le ou les copropriétaires ayant refusé de participer à l’emprunt.
Ce compte bancaire ne peut faire l’objet ni d’une convention de fusion, ni d’une compensation avec un autre compte.
Le paiement des travaux est réalisé sur présentation des factures par le syndic à l’établissement prêteur.
Aucune mesure conservatoire ou d’exécution forcée ne peut être mise en œuvre sur les sommes portées au crédit de ce compte bancaire réservé.
Conditions de remboursement de l’emprunt par les copropriétaires
(loi du 9.4.24 : art. 4 / loi du 10.7.65 : art. 26-10 à 26-13, art. 26-16 / CCH : L.732-3)
Seuls les copropriétaires bénéficiant de l’emprunt sont tenus de contribuer chaque mois ou chaque trimestre à son remboursement.
Ces copropriétaires contribuent ainsi en fonction de leur quotes-parts de dépenses, au remboursement :
- du prêt en capital, intérêts et des frais éventuels de caution, au syndicat des copropriétaires ;
- des frais et des honoraires afférents générés par le montage et par la gestion du prêt.
En cas de mutation d’un lot, contrairement à ce qui est prévu pour les autres emprunts collectifs souscrits par le syndicat des copropriétaires, la charge de la contribution au remboursement de l’emprunt collectif à adhésion automatique est transférée aux propriétaires successifs. La cession ne donne donc pas lieu à un remboursement de la charge d’emprunt par le syndicat des copropriétaires au copropriétaire vendeur.
En effet, ce nouvel emprunt est attaché aux lots et non à la personne des copropriétaires. Il n’y a donc aucune raison, en cas de vente, pour que soit requis l’accord de la banque et du garant avant le transfert au nouveau propriétaire de la charge de la contribution au remboursement de l’emprunt (cf. amendement n°123).
Le propriétaire peut choisir de rembourser sa part de l’emprunt par anticipation à tout moment, y compris à l’occasion de la vente du lot. L’acquéreur peut dans ce cas consentir à verser au vendeur un montant équivalent à ces sommes en sus du prix de vente du lot.
Dès le remboursement effectué, les sommes doivent être affectées sans délai par le syndic au remboursement de l’emprunt.
Lorsque des travaux d’amélioration sont votés, les copropriétaires qui n’ont pas donné leur accord à cette décision ont en principe la possibilité d’étaler le paiement des travaux. Dans ce cas, la part du coût des travaux, des charges financières y afférentes et des indemnités incombant aux copropriétaires peut n’être payée que par annuités égales au dixième de cette part (loi du 10.7.65 : art. 33). La loi précise que cette faculté n’est pas ouverte aux copropriétaires lorsqu’un emprunt collectif à adhésion automatique a été souscrit puisque dans le cadre de cet emprunt, tous les copropriétaires participent à l’emprunt selon les modalités contractuelles ou versent, dans un délai de six mois en cas de refus de participer à l’emprunt, la totalité de leur quote-part du prix des travaux.
Enfin, au même titre que l’ensemble des emprunts collectifs en copropriété, il est prévu l’obligation, pour l’emprunt à adhésion automatique, de comporter des facilités de remboursement anticipé pour tenir compte :
- du versement des subventions publiques accordées pour la réalisation des travaux votés ;
- du versement des montants des quotes-parts du coût des travaux des copropriétaires ne souhaitant pas bénéficier du prêt.
Constatation d’un sinistre de crédit en copropriété
(décret du 25.7.25 : art. 2 et 3 / décret du 17.3.67 : art. 38)
Les conditions du constat de la défaillance du copropriétaire pour rembourser le prêt collectif sont modifiées.
Tout d’abord, il est désormais fait référence à l’article 26-12 de la loi du 10 juillet 1965.
Ensuite, le principe du constat suite à une mise en demeure restée infructueuse pendant plus de 30 jours adressée par le syndic à compter de la première échéance impayée demeure. Toutefois, ces formalités ont été modifiées. Ainsi, dorénavant :
- il est précisé que cette mise en demeure n’a plus nécessairement à prendre la forme d’une lettre recommandée avec demande d’avis de réception puisqu’il doit satisfaire aux conditions de l’article 42-1 de la loi de 1965 qui prévoit la forme électronique par principe (par exception, sur demande du copropriétaire, la mise en demeure peut intervenir par voie postale) ;
- la mise en demeure doit intervenir après l’expiration d’un délai de 60 jours après l’envoi d’une lettre de relance, qui elle-même doit être envoyée au moins 30 jours après la date d’exigibilité du paiement de l’échéance.
Ces modifications s'appliquent aux échéances exigibles à compter du 1er octobre 2025 (premier jour du troisième mois suivant la publication du décret).
Modalités d’intervention du fonds de garantie pour la rénovation
(décret du 25.7.25 : art. 1er / CCH : R. 312-7-7)
Pour mémoire, le Fonds de garantie pour la rénovation (FGR), institué par l’article 20 de la loi du 17 août 2015 relative à la transition énergétique pour la croissance verte, permet de garantir ou contre-garantir :
- les éco-PTZ individuels accordés aux ménages (sous condition de ressources) ;
- les prêts avance mutation accordés à des personnes physiques (sous condition de ressources) finançant des travaux de rénovation énergétique dans un logement occupé à titre de résidence principale (ces prêts doivent être garantis par une hypothèque) ;
- les prêts collectifs aux copropriétés (éco-PTZ copropriétés et prêts collectifs pour des investissements améliorant la performance énergétique).
Le décret du 25 juillet 2025 opère plusieurs aménagements relatifs aux conditions d’intervention du FGR, notamment concernant les emprunts collectifs qu’il peut, dans certains cas contre-garantir.
Pour mémoire, la contre-garantie consiste à garantir les sociétés cautionnant les prêts.
Jusqu’au 27 juillet 2025, la contre-garantie du FGR ne couvrait que les emprunts collectifs existants à hauteur de 50 % des pertes subies suite à des sinistres de crédit.
Désormais, le fonds peut contre-garantir les cautionnements solidaires accordés pour garantir l’ensemble des prêts collectifs (cf. loi du 10.7.65 : art. 26-4 à 26-13) et délivrés par des entreprises d'assurance et des sociétés de caution jusqu'à hauteur de :
- 50 % des pertes subies à la suite de sinistres de crédit pour un prêt finançant
- les travaux mentionnés à l'article D. 319-16 (listés ci-dessus) ;
- les travaux permettant d'atteindre une diminution d'au moins 25 % de la consommation conventionnelle d'énergie primaire du bâtiment ;
- 80 % des pertes subies à la suite de sinistres de crédit pour les emprunts collectifs à adhésion automatique (loi du 10.7.65 : art. 26-4, III) octroyé aux syndicats de copropriétaires d'immeubles affectés à l'usage d'habitation et faisant l'objet :
- soit d'un plan de sauvegarde (cf. CCH : L.615-1) ;
- soit d'une Opération programmée d'amélioration de l'habitat (OPAH) poursuivant un objectif de redressement et de transformation de copropriétés dégradées (cf. CCH : L.303-1-1) ;
- soit d'une Opération de requalification des copropriétés dégradées (ORCOD, cf. CCH : L.741-1).
Pour mémoire, la contre-garantie du fonds couvre l'organisme qui l'a sollicitée dès la déclaration du sinistre.
Ces mesures sont entrées en vigueur le 28 juillet 2025.