Aller au contenu

Assurance construction

N° 2005-26 / A jour au 28 août 2009
Démarre le téléchargement du fichierOrdonnance du 8.6.05 : JO du 9.6.05


Conformément à la loi du 9.12.04 de simplification du droit, la présente ordonnance modifie profondément le droit de l'assurance construction, ainsi, qu'à la marge, celui de la responsabilité des constructeurs.
La mesure principale consiste en une modification du champ d'application des assurances construction obligatoires : l'assurance dommage ouvrage et l'assurance responsabilité civile décennale.
Deux autres mesures concernent le champ d'application de la garantie décennale et biennale des éléments d'équipement (Code civil : art. 192-2 et 1972-3) et la prescription des actions dirigées à l'encontre des sous-traitants.
Deux autres mesures ont pour objet, d'une part, de différencier la responsabilité des contrôleurs techniques de celle des constructeurs proprement dits, et de modifier la position du commissaire du gouvernement à l'occasion de procédures disciplinaires dirigées contre des géomètres experts, d'autre part. Elles ne sont pas étudiées ici. d'une garantie obligatoire les ouvrages autres que des bâtiments.

Modification du champ d'application de l'assurance construction obligatoire (art. 3)

A l'origine, le champ d'application de l'assurance construction obligatoire devait être légèrement différent de celui de la garantie décennale. L'assurance construction obligatoire ne s'étendait qu'aux travaux de bâtiment tandis que la garantie décennale couvre toutes les réalisations d'ouvrage. Le législateur n'avait pas jugé indispensable de faire relever d'une garantie obligatoire les ouvrages autres que des bâtiments.
Cependant, la jurisprudence a largement étendu le champ d'application de l'assurance obligatoire en soumettant à l'obligation d'assurance les ouvrages réalisés à l'aide des " techniques de travaux de bâtiments " (Cass. Civ. I : 26.1.91). De ce fait, certains ouvrages qui ne sont pourtant pas des bâtiments, tel qu'une digue ou un remblai, s'y trouvaient pourtant assujettis.
C'est afin de remédier à cette situation, source d'insécurité juridique et lourdes de conséquences sur le plan financier pour les assureurs, qu'il a été décidé de substituer la notion d'ouvrage à celle de bâtiment et corrélativement de dresser une liste exhaustive des ouvrages exclus du champ des obligations d'assurance.
Sont donc désormais tenus de s'assurer, sauf exception, toute les personnes physiques ou morales dont la responsabilité décennale peut être engagée à l'occasion de travaux de construction aboutissant à la réalisation d'un ouvrage (Code des assurances : art. L. 241-1), de même que tout maître de l'ouvrage qui fait réaliser des travaux de construction susceptible d'engager la responsabilité décennale des constructeurs (Code des assurances : art. L. 242-1).

Ouvrages exclus du champ d'application de l'assurance construction (Code des assurances : art. L. 243-1-1-I alinéa 1 nouveau)

Ne sont pas soumis à obligation d'assurance :

  • les ouvrages maritimes, lacustres, fluviaux ;
  • les ouvrages d'infrastructures routières, portuaires, aéroportuaires, héliportuaires, ferroviaires ;
  • les ouvrages de traitement de résidus urbains, de déchets industriels et d'effluents.

Les éléments d'équipement de l'un ou l'autre de ces ouvrages sont également exclus du champ de l'assurance obligatoire.

Ouvrages exclus du champ d'application de l'assurance construction sous condition (Code des assurances : art. L. 243-1-1-I alinéa 2 nouveau)

Sont également exclus, mais à condition qu'ils ne constituent pas l'accessoire d'un ouvrage soumis à obligation d'assurance :

  • les voiries, les ouvrages piétonniers, les parcs de stationnement ;
  • les réseaux divers, les canalisations, les lignes ou câbles et leurs supports ;
  • les ouvrages de transport, de production, de stockage et de distribution d'énergie ;
  • les ouvrages de télécommunications ;
  • les ouvrages sportifs non couverts.

Les travaux de voirie et réseaux divers (VRD) se trouvent ainsi exclus du champ d'application de l'assurance obligatoire à condition qu'ils ne constituent pas l'accessoire d'un ouvrage soumis à l'obligation d'assurance. Il s'agit là d'une innovation importante. Il est toutefois à craindre que la définition du caractère accessoire d'une construction soumise à assurance obligatoire pose certaines difficultés en pratique.
Concernant les lotissements, il semble que l'on puisse en déduire que les VRD situés sur le terrain d'assiette de la future maison d'habitation seront soumis à l'obligation d'assurance tandis que ceux réalisés dans le cadre global de l'opération d'aménagement (voiries et réseaux affectés à l'usage de l'ensemble des colotis) s'en trouveront exclus.
Pour autant, il convient de rappeler que si les travaux de VRD sont effectivement exclus du champ de l'assurance obligatoire, il n'en reste pas moins que les VRD restent des ouvrages au sens de la garantie décennale et que par conséquent les lotisseurs restent redevables de la garantie décennale.
Cette remarque est également valable pour tous les constructeurs dont les ouvrages sont expressément exclus du champ de l'obligation d'assurance au titre du code des assurances mais qui reste des ouvrages au titre des articles 1792 et suivant du Code civil.

Ouvrages existants et assurance obligatoire (Code des assurances : art. L. 243-1-1-II nouveau)

Lors de la réalisation de travaux sur un ouvrage existant aboutissant à la réalisation d'un ouvrage (travaux de rénovation lourde ou adjonction d'éléments nouveaux tel qu'une cheminée), il est acquis que le maître de l'ouvrage, ainsi que ses constructeurs, sont soumis à l'obligation d'assurance.
En revanche, de longs débats ont eu lieu, tant en doctrine qu'en jurisprudence, pour savoir si en cas de désordres sur des ouvrages existants du fait des travaux neufs, la garantie de l'assureur dommage-ouvrage ou responsabilité décennale devait couvrir les désordres affectant les travaux neufs uniquement, ou également ceux affectant les ouvrages existants.
De manière prétorienne, la Cour de Cassation a considéré que les assureurs étaient tenus à réparation pour l'ensemble lorsque les travaux nouveaux étaient devenus matériellement indivisibles des ouvrages anciens (Cass. Civ. I : 30.3.94).
De manière plus inattendue, la Cour de Cassation a également considéré que les assurances obligatoires pouvaient être mises en jeu au titre des dommages aux existants lorsque les travaux nouveaux ont joué un lien causal dans la survenance du dommage. En l'occurrence, il s'agissait de la réalisation d'une cheminée dans une construction existante. Cette cheminée avait provoqué un incendie ravageant l'ensemble de l'habitation. L'assureur du constructeur en responsabilité civile décennale avait été tenu de réparer l'ensemble du sinistre (Cass. Civ. I : 4.12.01).
Afin de faire échec à cette seconde jurisprudence de la Cour de cassation, le code des assurances prévoit désormais que les assurances obligatoires " ne sont pas applicables aux ouvrages existants avant l'ouverture du chantier, à l'exception de ceux qui, totalement incorporés dans l'ouvrage neuf, en deviennent techniquement indivisibles ".
Reste à savoir comment cette précision législative sera interprétée par la jurisprudence qui dans ces dernières décisions (Cass. Civ. III : 27.5.03) imposait la réparation des désordres affectant les ouvrages existants lors d'opération de rénovation au motif que les travaux nécessaires à la réparation des vices propres des existants ont été laissés " à tort " et " contrairement aux règles de l'art ", " à la suite d'une erreur de diagnostic ", hors du champ d'intervention des travaux nouveaux ne présentant techniquement aucun caractère d'indivisibilité au plan matériel.

La garantie décennale et biennal des éléments d'équipements (art. 1)

Extension de la garantie décennale et biennale des éléments d'équipement

Jusqu'ici, en dehors de l'atteinte à la solidité ou à la destination de l'ouvrage, seuls les éléments d'équipement d'un " bâtiment " étaient susceptibles de bénéficier de la garantie décennale ou biennale, selon leur caractère dissociable ou non (Code civil : art. 192-2 et 1792-3).
Compte tenu de la difficulté à appréhender la notion de bâtiment, il a été décidé d'abandonner toute référence à cette notion.
Dans un souci de cohérence et de simplification, le bénéfice de ces garanties est étendu aux éléments d'équipement d'un ouvrage.

Définition de la notion d'élément d'équipement (Code civil : art. 1792-7 nouveau)

Suivant les mêmes préoccupations, la définition des éléments d'équipement est précisée. Ne peuvent être considérés comme des éléments d'équipements d'un ouvrage au sens de la garantie décennale et biennale " les éléments d'équipements, y compris leur accessoires, dont la fonction exclusive est de permettre l'exercice d'une activité professionnelle dans l'ouvrage ". Cette définition reprend l'une des propositions faites par le " Rapport sur le champ d'application de l'assurance construction obligatoire" de décembre 1997 et se situe dans la droite ligne de la jurisprudence de la Cour de cassation (Cass. Civ. III : 22.7.98 et 4.11.99).

Prescription des actions en responsabilité à l'encontre des sous-traitants (art. 2)

La responsabilité des constructeurs contractuellement liés au maître de l'ouvrage court du jour de la réception que leur responsabilité soit recherchée sur le fondement de la garantie décennale, de la garantie biennale ou de la théorie des désordres intermédiaires (Cass. Civ. III : 16.10.02). Pour les dommages à l'ouvrage, ces constructeurs sont donc à l'abri de tout recours du maître de l'ouvrage passé un délai de 10 ans à compter de la date de la réception.
Les sous-traitants quant à eux se trouvaient dans une situation différente puisque n'étant pas contractuellement liés au maître de l'ouvrage, ils encourraient le risque de voir prospérer une action sur un fondement délictuel dont la prescription était également de 10 ans mais dont le point de départ ne courrait que du jour de la manifestation du dommage ou de son aggravation
Il est désormais prévu que les actions en responsabilité dirigées contre un sous-traitant se prescrivent, à compter de la réception, par dix ans pour les dommages à l'ouvrage et par deux ans pour dommages affectant les éléments d'équipements dissociables de cet ouvrage (Code civil : art. 1792-4-2).
Cette disposition de caractère générale paraît applicable aussi bien aux actions engagées sur un fondement délictuel par le maître de l'ouvrage, qu'aux actions exercées sur un fondement contractuel par les entrepreneurs principaux, confortant ainsi la jurisprudence de la Cour de Cassation (Cass. Civ. III : 16.10.02). Cette question est sans intérêt depuis la loi du 17 juin 2008 portant réforme de la prescription. En dehors des actions en responsabilité dirigées contre un sous-traitant en raison des dommages à l’ouvrage, les actions en responsabilité dirigées contre les constructeurs et leurs sous-traitants se prescrivent par 10 à compter de la réception (Code civil : art.1792-4-3).

Entrée en vigueur (art. 5)

L'ensemble de ces dispositions, à l'exception de celles de l'article 2, ne s'applique qu'aux marchés, contrats ou conventions conclus après la publication de la présente ordonnance.
Cela signifie que l'incertitude juridique liée à la rédaction des anciens textes devrait encore perdurer un certain temps et surtout qu'en cas de sinistre il deviendra primordial de se référer à la date des marchés de travaux mais aussi des contrats d'assurance afin de connaître la législation applicable.

Retour en haut de page