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Loi relative à la transition vers un système énergétique sobre

N° 2013-10 / A jour au 1er juillet 2014
Loi du 15.4.13 : JO du 16.4.13 / Décret du 8.4.04 : JO du 10.4.04 / Décret du 13.8.08 : JO du 14.8.08 / Arrêté du 21.12.12 : JO du 26.12.12 / Décret du 15.11.13 : JO du 16.11.13 / Délibération de la CRE du 18.11.13 / Décret du 27.2.14 : JO du 1.3.14 / Instruction du 4.3.14

La loi, dite Brottes, visant à préparer la transition vers un système énergétique sobre et portant diverses dispositions sur la tarification de l’eau et sur les éoliennes s’attache principalement, à améliorer la prise en compte de la précarité énergétique.
La mesure portant sur la création, à partir de 2015, d'un bonus-malus sur les consommations d'énergies de réseau (électricité, gaz naturel et chaleur) a été déclarée non conforme à la Constitution (Cons. Constit n° 2013-666 du 11.4.13).

Amélioration de la prise en compte de la précarité énergétique

Extension du tarif de première nécessité (art. 7 / Code de l’énergie : L.121-5 et L.337-3)

Cet article pose les bases législatives de l'extension du champ des bénéficiaires des tarifs sociaux à l’ensemble des ménages en situation de précarité énergétique et permet l’extension du tarif de première nécessité (TPN) à tous les fournisseurs alternatifs d’électricité.

Pour rappel, les tarifs de vente d'électricité aux consommateurs tiennent compte du caractère indispensable de l'électricité pour les consommateurs dont les revenus du foyer sont, au regard de la composition familiale, inférieurs à un plafond, en instaurant pour une tranche de leur consommation une tarification spéciale « produit de première nécessité ». Cette tarification spéciale est applicable aux services liés à la fourniture (Code de l’énergie : L.337-3).

Extension du champ des bénéficiaires

Le champ des bénéficiaires des tarifs sociaux de l’énergie était limité à ceux dont les revenus ouvraient le droit à la couverture maladie universelle complémentaire (CMUC). La tarification sociale a été élargie, en 2012, aux allocataires de l’aide au paiement d’une assurance complémentaire santé (ACS), c’est-à-dire, aux foyers très modestes dont les revenus sont inférieurs à 967 euros par mois (arrêté du 21 décembre 2012). En 2013, une extension beaucoup plus large est réalisée par la prise en compte du revenu fiscal de référence des foyers (décret du 15 novembre 2013). Les tarifs sociaux de l’électricité et du gaz sont ouverts aux personnes dont le revenu fiscal annuel par part du foyer soumis à l’impôt sur le revenu est inférieur à 2 175 euros. Ce montant est majoré de 11,3 % pour les foyers résidants dans les départements de la Guadeloupe, de la Guyane, de la Martinique, de la Réunion et de Mayotte.

Les modalités de calcul de la tarification

Afin de préparer l’extension du champ des bénéficiaires des tarifs sociaux à l’ensemble des ménages en situation de précarité énergétique, l’administration fiscale et l’ensemble des organismes de sécurité sociale, et non plus la seule assurance maladie, devront transmettre la liste des bénéficiaires potentiels aux fournisseurs d’énergie.
Pour les personnes physiques bénéficiaires, le TPN qui consistait en une réduction calculée par rapport aux tarifs réglementés de vente d’électricité est transformé en une déduction forfaitaire sur le prix de fourniture contractuellement établi avec le fournisseur d’électricité, comme c’est déjà le cas pour le tarif spécial de solidarité du gaz naturel (TSS).
Toutes les six semaines, les gestionnaires de réseaux de distribution d’électricité vont communiquer à l’organisme agissant pour le compte des fournisseurs, les informations nécessaires pour l’identification des bénéficiaires potentiels du TPN de chaque fournisseur d’électricité.
La déduction représentera, pour les personnes bénéficiaires, une réduction variant entre 22 et 156 euros par an pour le TSS et une réduction moyenne annuelle de l’ordre de 100 euros pour le TPN (communiqué de presse du 16 novembre 2013).

Extension du TPN aux résidences sociales

Les gestionnaires de résidences sociales qui font l’objet d’un conventionnement avec l’État ont la possibilité de bénéficier du TPN (Code de l’énergie : L.337-3).
Les résidences sociales constituent une catégorie de logements-foyers et sont destinées à l’accueil des personnes ou familles éprouvant des difficultés (CCH : L.301-1 II). Elles sont donc destinées au logement collectif à titre de résidence principale de personnes dans des immeubles comportant à la fois des locaux privatifs meublés ou non et des locaux communs affectés à la vie collective (CCH : L.633-1).
Les gestionnaires de résidences sociales doivent formuler une demande aux fournisseurs d’énergie ou aux organismes agissant pour leur compte. La liste des documents devant accompagner la demande de tarification sociale est fixée par le décret du 15 novembre 2013. Lorsque les occupants ne détiennent pas de contrats individuels de fourniture d’électricité ou de gaz naturel, le gestionnaire de la résidence sociale se voit attribuer un montant de réduction proportionnel au nombre de logements (déduction de 47 euros par an et par logement pour l’électricité et 72 euros par an et par logement pour le gaz naturel). Le montant de la déduction est remboursé mensuellement aux résidents, avec une remise de 5% pour les frais de gestion.

Trêve hivernale des coupures d’énergie et d’eau (art.19 / CASF : L.115-3)

Du 1er novembre de chaque année au 15 mars de l'année suivante, les fournisseurs d'électricité, de chaleur et de gaz ne peuvent procéder à l’interruption de la fourniture des résidences principales des consommateurs domestiques n’ayant pas réglé leurs factures qu’ils aient ou non bénéficié d’une aide du Fonds de solidarité pour le logement (FSL) (CASF : L.115-3).
Les fournisseurs ne peuvent ni interrompre, ni résilier le contrat de fourniture d'énergie sur cette période.
Néanmoins, la possibilité est offerte aux fournisseurs d'électricité de réduire la puissance fournie, sauf pour les ménages en situation de précarité énergétique bénéficiant de la tarification spéciale « produit de première nécessité » (Code de l'énergie : L.337-3). Cette réduction de puissance doit être mise en œuvre dans la limite de trois kilovoltampères (KVA), lorsque la puissance souscrite par le consommateur est de six KVA ou plus, ou de deux KVA, pour les clients bénéficiant d'une puissance souscrite de trois KVA.

S’agissant de l’eau, l’interruption de la fourniture des résidences principales des consommateurs domestiques n’ayant pas réglé leurs factures est interdite tout au long de l’année (CASF : L.115-3 al.3).

Expérimentation pour une tarification sociale de l’eau (art. 28 / CGCT : L.2224-12-1)

Une expérimentation est engagée pour une période de cinq années depuis le 15 avril 2013, en vue de favoriser l’accès à l’eau et de mettre en œuvre une tarification sociale de celle-ci. Cette expérimentation peut être menée par les collectivités territoriales organisatrices des services d'eau et d'assainissement (communes et départements) et les groupements auxquels elles ont transféré cette compétence. La demande d'expérimentation est transmise au préfet concerné avant le 31 décembre 2014. Les collectivités territoriales demandant à participer à l'expérimentation en informent l'agence de l'eau ou, dans les départements d’outre-mer, l’office de l’eau.
Pour la mise en œuvre de l'expérimentation, les collectivités territoriales sont autorisées à prévoir :

  • une facturation tenant compte du caractère indispensable de l'eau potable pour les abonnés en situation particulière de vulnérabilité, avec possibilité d’instaurer un tarif progressif pouvant inclure une première tranche de consommation gratuite.
  • une définition de tarifs tenant compte de la composition ou des revenus du foyer, de l'attribution d'une aide au paiement des factures d'eau ou d'une aide à l'accès à l'eau.
  • dans leur budget propre, tout ou partie du montant de l'aide attribuée par le service pour le paiement des factures d'eau des foyers en situation de précarité ou ayant des difficultés de paiement de leurs factures d'eau.
  • une dérogation au plafond de la subvention allouée au fonds de solidarité pour le logement, (à savoir 2% des montants hors taxes des redevances d'eau ou d'assainissement perçues).
  • que le service assurant la facturation de l'eau procède au versement d'aides pour l'accès à l'eau par les foyers ayant des difficultés de paiement de leurs factures d'eau et dont les ressources sont insuffisantes.

Le projet d'expérimentation est présenté pour avis à la commission consultative des services publics locaux, qui est informée du déroulement et des résultats de l'expérimentation, auxquels peuvent être associés les gestionnaires assurant la facturation des services d'eau et d'assainissement concernés, le département, les agences de l'eau et, dans les départements d'outre-mer, les offices de l'eau, les associations de gestionnaires publics ou privés d'immeubles d'habitation, les associations de locataires, les organismes de gestion du logement social dans les collectivités territoriales concernées et, le cas échéant, les caisses locales d'allocations familiales gestionnaires des aides au logement.

Les organismes de sécurité sociale, de gestion de l'aide au logement ou de l'aide sociale devront aussi fournir aux services engageant l'expérimentation les données nécessaires pour établir la tarification sociale de l'eau ou attribuer une aide au paiement des factures d'eau ou une aide à l'accès à l'eau aux foyers dont les ressources sont insuffisantes. Quant aux agences de l'eau, elles peuvent apporter des aides aux études de définition et de suivi de l'expérimentation, dans la limite de la moitié des dépenses.
Le Comité national de l'eau est chargé du suivi et de l'évaluation de l'expérimentation. Il devra remettre au gouvernement, avant la fin de l'année 2015, un rapport décrivant les actions engagées dans le cadre de l'expérimentation et, avant la fin de l'année 2017, un rapport d'évaluation et de proposition, un rapport intermédiaire étant remis avant la fin de l'année 2016. Ces rapports sont transmis aux collectivités territoriales qui ont participé à l'expérimentation pour observations.

Obligation d’information

Information des consommateurs et des services sociaux

Les fournisseurs d'électricité, de gaz ou de chaleur doivent informer les clients en situation d’impayés, entre le 1er novembre et le 15 mars, de l’existence de l’interdiction hivernale d’interruption de fourniture et de la possibilité de réduction de puissance de la fourniture d’électricité pour les non bénéficiaires du tarif social de l’électricité, dans les résidences principales. Cette information intervient au moment de l’envoi du second courrier avant l’interruption ou la réduction de fourniture.
Lorsque l'interruption de fourniture ou la réduction de puissance pour impayé pratiquée a été maintenue pendant cinq jours, le fournisseur en informe, le premier jour ouvré suivant, les services sociaux du département et, le cas échéant, les services sociaux communaux lorsque ces derniers sont cosignataires de la convention départementale de financement du FSL.

Information des instances de contrôle

Médiateur national de l’énergie (art. 8 / Code de l’énergie : L.122-1 et L.122-5)

Déjà compétent en matière de litiges entre les consommateurs et les fournisseurs d'électricité ou de gaz naturel, le médiateur de l'énergie traitera également des litiges entre les consommateurs et les gestionnaires du réseau de distribution d'électricité et de gaz naturel (Code de l'énergie : L.122-1).
Il peut être saisi des litiges nés de l'exécution des contrats conclus par les consommateurs particuliers non professionnels (associations, syndicats de copropriétaires…) et professionnels appartenant à la catégorie des microentreprises (moins de 10 personnes et chiffre d’affaire annuel ou total bilan n’excédant pas 2 millions d’euros).

Ces contrats doivent avoir fait l’objet d’une réclamation écrite préalable du consommateur auprès du fournisseur ou du distributeur concerné, qui n’a pas permis de régler le différend dans un délai fixé par voie réglementaire (Code de l’énergie : L.122-1).
Le médiateur est saisi directement et gratuitement par le consommateur ou son mandataire. Il formule sa recommandation écrite et motivée dans un délai de deux mois. Sa saisine suspend la prescription des actions en matière civile et pénale pendant ce délai.

Commission de régulation de l’énergie (CRE) (art.9 / Code de l’énergie : L.132-2)

Deux nouveaux membres viennent compléter le collège de la CRE : un représentant des consommateurs non-professionnels et le président de la CNIL.

Afin de permettre un meilleur suivi de l’évolution de la précarité énergétique, les fournisseurs d'électricité, de gaz ou de chaleur doivent transmettre chaque semestre à la CRE et au Médiateur national de l’énergie, des informations relatives aux  interruptions de fourniture et aux réductions de puissance auxquelles ils ont procédé pour non-paiement des factures (le nombre d'interruptions de fourniture sans résiliation, le nombre de résiliations de contrat et le nombre de réductions de puissance). Ces informations sont transmises par trimestre civil, au plus tard à la fin du mois suivant chaque trimestre.

Service public de la performance énergétique (art.12 / Code de l’énergie : L.232-1 à L.232-3)

Un service public de la performance énergétique de l'habitat est créé. Il assure l’accompagnement des consommateurs souhaitant diminuer leur consommation énergétique en les assistant dans les actions qu’ils mettent en œuvre pour réussir leur transition vers un comportement plus sobre en énergie. Ce service public vise expressément les locataires et les propriétaires en leur fournissant des informations et des conseils personnalisés sur les travaux d’amélioration de la performance énergétique de leur logement.

La CRE confirme l’augmentation de la contribution au service public de l’électricité (CSPE) due par tous les consommateurs finals d’électricité, au prorata des kWh consommés (délibération du 18 novembre 2013). Depuis le 1er janvier 2014, elle a augmenté de 3 euros/MWh. Cette taxe sert, notamment, à financer les politiques en faveur des énergies renouvelables.

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