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Garantie d'achèvement / Garantie autonome / Limites

Cass. Com. : 25.2.04


Cet arrêt revient sur la nature juridique de la garantie d'achèvement que le lotisseur est tenu d'obtenir s'il souhaite commercialiser ses lots avant l'achèvement des travaux. Il apporte également une précision intéressante sur les limites de cette garantie lorsque l'autorisation de lotir est modifiée et entraîne une augmentation du nombre de lots commercialisables.

Sur le premier point, la Cour de cassation reprend une jurisprudence, désormais établie (Cass. Civ. III : 28.11.01), selon laquelle la garantie d'achèvement fournie par un établissement financier au bénéfice des acquéreurs de lots est une garantie spécifique et autonome qui ne peut s'assimiler à une simple caution. Ce caractère autonome, qui en réalité s'applique à toutes les garanties financières en matière immobilière, a pour effet d'interdire au garant d'opposer au bénéficiaire de la garantie toutes les exceptions inhérentes à la dette, et notamment de faire valoir le défaut de déclaration par l'acquéreur de sa créance au passif du règlement ou de la liquidation judiciaire du lotisseur, comme ce fut le cas en l'espèce. Pour autant, le caractère autonome de cette garantie n'est pas total puisque les acquéreurs ne pourront saisir le garant qu'après avoir démontré la défaillance du lotisseur.

Sur le second point, l'arrêt apporte une précision importante pour la pratique. Il est courant qu'un programme immobilier, tel un lotissement, fasse l'objet de modifications en cours de réalisation.

Les aménageurs ou constructeurs omettent alors parfois d'en avertir leur garant d'achèvement et de conclure un avenant au contrat initial, lequel est conclu sur la base de l'autorisation de lotir primitive. En cas de défaillance du lotisseur, le garant sera alors tenté de refuser sa garantie pour les lots non prévus initialement. La Cour de cassation, par cet arrêt, admet la validité d'un refus de garantie fondé sur ce motif.

En l'espèce, l'arrêté de lotir avait fait l'objet de deux arrêtés modificatifs permettant d'étendre le nombre de lots commercialisables sans qu'aucun avenant ne soit conclu entre le lotisseur et son banquier.

La Cour de cassation approuve les juges du fond d'avoir rejeté l'appel en garantie des clients dont les parcelles ne figuraient pas dans l'autorisation de lotir initiale et à laquelle le certificat de garantie d'achèvement faisait exclusivement référence.

Cet arrêt revêt une grande importance pour tous les garants d'achèvement, mais aussi pour tous les acheteurs de lots. Il leur revient désormais, ainsi qu'à leur notaire, de s'assurer que l'autorisation de lotir n'a fait l'objet d'aucune modification et que, dans le cas contraire, celles-ci ont bien fait l'objet d'un avenant entre le lotisseur et son garant.

Ce dernier devra, pour sa part, s'assurer que les attestations qu'il fournit à son cocontractant permettent d'assurer clairement l'information des acquéreurs de lots. Dans le cas contraire, on peut supposer qu'il s'exposerait à voir sa responsabilité délictuelle engagée à l'égard des acquéreurs de lots, à l'image de ce qui s'est produit récemment pour l'assureur en responsabilité décennale concernant la limitation de garantie au secteur d'activité déclaré par l'entrepreneur assuré (Cass. Civ. III : 17.12.03).

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