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Loi relative à la transparence, à la lutte contre la corruption et à la modernisation de la vie économique

N° 2016-35 / À jour au 5 juillet 2017
Loi n°2016-1691 du 9.12.16 : JO du 10.12.16 / Ordonnance n° 2017-1090 du 1.6.17 : JO du 3.6.17 / Ordonnance n° 2017-562 du 29.4.17 : JO du 20.4.17 (rapport du Président de la République) / décret n°2017-1099 du 14.6.17 : JO du 16.6.17

La loi relative à la transparence, la lutte contre la corruption et la modernisation de la vie économique, dite "Sapin 2", composée de 169 articles, comporte plusieurs dispositions en lien avec le domaine du logement. Elles concernent le crédit immobilier, la publicité sur les dispositifs d’investissement locatif, le surendettement, la domanialité publique…

Les modalités d’application de la loi sont définies par l’ordonnance du 20 avril 2017 pour les mesures relative à la propriété des personnes publiques et par l’ordonnance du 1er juin 2017 pour celles relatives à la domiciliation des revenus, lors d’un emprunt immobilier, sur un compte bancaire de paiement.

Crédit immobilier (art. 67 II, art. 82 I et II / Code de la consommation : L.313-25

Ouverture d’un compte de dépôt et domiciliation des revenus associés à un crédit immobilier (art. 67 II)

Les travaux conduits dans le cadre de plusieurs modifications législatives récentes ont fait apparaître que les clauses d’ouverture de compte et de domiciliation des revenus associées à la souscription d’un contrat de crédit immobilier, étaient perçues par les particuliers comme des freins à la mobilité bancaire (cf. exposé sommaire de l’amendement gouvernemental à l’article 67 II).

L’article 67 II de la loi a habilité le Gouvernement à prendre par ordonnance, avant le 9 juin 2017, toute mesure permettant d’encadrer les conditions dans lesquelles la souscription par un consommateur d'un contrat de crédit immobilier ainsi que le niveau de son taux d’intérêt peuvent être associés à l’ouverture d’un compte de dépôt et à la domiciliation de ses revenus, quelle que soient leur nature (salaires, pensions de retraite…) ou leur origine, pendant la durée du crédit.

Une ordonnance du 1er juin 2017 relative aux offres de prêt immobilier conditionnées à la domiciliation des salaires ou revenus assimilés de l’emprunteur sur un compte de paiement modifient les dispositions relatives aux mentions des offres de prêt (Code de la consommation : L.313-25) et des avenants en cas de renégociation de prêt (Code de la consommation : L.313-39). Elle insère dans le Code de la consommation deux nouveaux articles relatifs à la condition de domiciliation des offres de prêt (Code de la consommation : L. 313-25-1) et aux sanctions en présence d’une clause de domiciliation irrégulière (Code de la consommation : L.341-34-1). Un projet de loi de ratification du texte devra être déposé devant le Parlement avant le 3 septembre 2017 (cf. : "La clause de domiciliation des salaires et revenus assimilés : contrepartie d’un avantage individualisé et  effets limités dans le temps"). Ces nouvelles dispositions s’appliquent aux offres de prêt émises à compter du 1er janvier 2018 (et, le cas échéant, à leurs avenants).

Cette mesure fait suite aux dispositions relatives à l’encadrement juridique de la mobilité bancaire, c’est-à-dire le fait pour un client de changer de banque, prévues par la loi n° 2014-344 du 17 mars 2014 relative à la consommation (art. 53) et complétées par la loi n° 2015-990 du 6 août 2015 pour la croissance, l’activité et l’égalité des chances économiques dans son article 43, dont plusieurs dispositions  sont entrées en vigueur le 6 février 2017 (service automatisé d’aide à la mobilité bancaire).

Sur le sujet de la domiciliation des revenus associée à un contrat de crédit immobilier, on peut rappeler plusieurs points :

  • les politiques commerciales des établissements de crédit font des prêts immobiliers un moyen d’attirer  de nouveaux clients, ce qui peut expliquer le niveau élevé de la concurrence. Aussi, la domiciliation des salaires,  fait partie de la négociation commerciale d’un crédit immobilier. Elle constitue aussi un élément de sécurité pour le prêteur. L’emprunteur a cependant le choix de la refuser (Rép. Min n° 33894 : JO AN du 7.2.06) ;
  • la Commission des clauses abusives (recommandation n° 04-03 relative aux contrats de prêt immobilier) a recommandé que soient éliminées des contrats de crédit immobilier les clauses ayant pour objet ou pour effet d’obliger l’emprunteur, pendant toute la durée du prêt, à verser l’ensemble de ses revenus sur un même compte dans l’établissement prêteur, sous peine de déchéance de terme, alors même que l’emprunteur aura ponctuellement satisfait à ses remboursements et de ne prévoir aucune contrepartie individualisée à cette obligation au profit de l’emprunteur. Pour mémoire, la commission, lorsqu’elle émet des recommandations, n’édicte pas des règles qui s’imposent aux particuliers ou aux autorités publiques, mais invitent les professionnels concernés à supprimer ou modifier les clauses dont elle estime qu’elles présentent un caractère abusif. Il appartient au juge compétent, en cas de litige, de prononcer, le cas échéant, la nullité de telles clauses.
    Ainsi, certains contrats de prêts précisent que la clause d’engagement de l’emprunteur de domicilier ses revenus est la contrepartie d’un taux préférentiel. En cas de non-respect de cette obligation, le prêteur se réserve le droit de majorer le taux préférentiel par exemple d’un point. Cette clause a pu été validée par des juges du fond (exemple : CA Nîmes 24.10.13) ;
  • depuis le 1er octobre 2016, les dispositions du Code de la consommation relatives au régime du crédit immobilier prévoient expressément que les frais d’ouverture et de tenue d’un compte donné sont compris dans le TAEG dès lors que ces frais sont nécessaires pour obtenir le crédit ou pour l’obtenir aux conditions annoncées (Code de la consommation : R.314-4).

La clause de domiciliation des salaires et revenus assimilés : contrepartie d’un avantage individualisé et effets limités à dix ans maximum (Code de la consommation : L. 313-25-1/R .313-21-1).

Tout d’abord, pour que le prêteur conditionne l’offre de prêt à la domiciliation par l’emprunteur de ses salaires ou revenus assimilés sur un compte de paiement, il doit, en contrepartie, faire bénéficier ce dernier d’un avantage individualisé (avantage de taux ou autre : réduction de frais bancaires par exemple).

Ensuite, la clause de domiciliation des revenus ne peut être imposée au-delà d’une durée de dix ans maximale. A l'issue du délai fixé dans l’offre de prêt (dans la limite du délai maximal de dix ans), l'avantage individualisé consenti à l'emprunteur sera considéré comme définitivement acquis jusqu'au terme du contrat de crédit.

Avant ce terme, et si l’obligation de domiciliation n’est plus respectée, l’établissement prêteur pourra mettre fin pour les échéances restant à courir à l’avantage individualisé et appliquer les conditions de taux ou autres prévues pour cette situation dans l’offre de prêt.

Toute clause qui ne respecte pas ces deux prescriptions est réputée non écrite (Code de la consommation : L. 341-34-1).

Les mentions relatives à la clause de domiciliation des salaires dans l’offre de prêt (Code de la consommation : L.313-25 10°)

L’offre de prêt indique si le prêt est subordonné à la condition de domiciliation.

Si c’est le cas, doit figurer dans l’offre de prêt :

  • la durée de domiciliation ;
  • la nature de l'avantage individualisé accordé en contrepartie de la clause ; l’offre doit permettre d’identifier clairement cet avantage en mentionnant les conditions de taux ou autre, au regard desquelles elle est établie et celles qui seraient appliquées par le prêteur si l’exigence de domiciliation n’était plus respectée par l’emprunteur ;
  • le cas échéant, les frais d’ouverture et de tenue de compte sur lequel les salaires ou revenus sont domiciliés.

Pour mémoire, ces frais sont compris dans le TAEG dès lors qu’ils sont nécessaires pour obtenir le crédit ou pour l’obtenir aux conditions annoncées (Code de la consommation : R.314-4).

Nota bene : en cas de renégociation de ces offres de prêts, et dès lors que les modifications au contrat de prêt concernent la condition de domiciliation, ces mentions doivent également figurer dans l’avenant (Code de la consommation : L.313-39).

Contenu de l’offre de crédit : déliaison assurance emprunteur et crédit immobilier (art. 82 I et II / Code de la consommation : L.313-25)

Depuis le 1er septembre 2010, les offres de prêt mentionnent que l’emprunteur peut souscrire une assurance emprunteur auprès de l’assureur de son choix. Pour mémoire, ce libre choix qui existait jusqu’à la signature de l’offre de prêt a été aménagé par la loi du 26 juillet 2013 (cf. analyse juridique n°2013-16) puis étendu, par la loi du 17 mars 2014 relative à la consommation, pour les offres de prêt émises à compter du 26 juillet 2014, à la période de douze mois suivant l’acceptation de l’offre de prêt. Ainsi, pour ces offres, l'emprunteur peut décider de substituer au contrat d’assurance emprunteur initial un autre contrat d'assurance présentant un niveau de garanties équivalent. Au-delà de ce délai, la faculté de substitution du contrat d’assurance par un nouveau contrat relève des clauses contractuelles.

Afin de faciliter pendant la première année, l’exercice du droit de résiliation et de substitution du contrat d’assurance, l’article 82 de la loi renforce l’information des emprunteurs sur ce droit et prévoit que les offres émises à compter du 1er janvier 2017 doivent préciser les documents que doit contenir la demande de substitution.

Pour mémoire, le décret du 29 avril 2015 codifié depuis le 1er octobre 2016 à l’article R.313-24 définit les conditions dans lesquelles prêteurs et assureurs délégués s’échangent les informations préalables à la souscription des contrats d’assurance externes liés à un crédit immobilier.

Nota : en revanche, le paragraphe III de l'article 82 (cf. point 120 de la décision du Conseil constitutionnel) de la loi qui instaurait un droit de résiliation annuelle, au-delà de la période des douze mois après l’acceptation de l’offre de prêt, a été censuré puisque adopté par une procédure contraire à la constitution ("cavalier législatif"). Toutefois, dans le cadre du projet de loi de ratification (art.4 bis) des ordonnances n° 2016-301 du 14 mars 2016 relatif à la partie législative du Code de la consommation et n°2016-351 du 25 mars 2016 sur les contrats de crédit aux consommateurs relatifs aux biens immobiliers à usage d’habitation et simplifiant le dispositif de mise en œuvre des obligations en matière de conformité et de sécurité des produits et des services, un droit de résiliation annuel a été introduit par le Sénat. Il concernerait les offres de prêt émises à compter du 1er mars 2017. Le texte est encore d’examen par le Parlement.

Concernant les contrats antérieurs au 26 juillet 2014, la Cour de cassation a refusé l’application de la disposition sur le droit de résiliation annuelle (Code des assurances : L.113-12) aux contrats d’assurance emprunteur collectifs bien que certains juges du fond appliquent ce droit de résiliation annuelle (CA Douai 4.5.16).

Publicité pour les dispositifs d’investissement locatif (art.78 / Code de la consommation : L.122-23)

Depuis le 3 juillet 2010, toute publicité relative à une opération d’acquisition de logement destiné à la location et susceptible de bénéficier d’avantages fiscaux est encadrée (cf. analyse juridique n°2010-22). Cette disposition, qui concerne depuis le 11 décembre 2016, les investissements (*) Malraux, Censi-Bouvard et Pinel, est :

  • codifiée dans le Code de la consommation (L.122-23) ; l’article 28 de la loi du 1er juillet 2010 portant réforme du crédit à la consommation est abrogé ;
  • complétée par une sanction administrative qui prend la forme d’une amende administrative, dont le montant ne pourra excéder 100.000 € en cas non-respect des prescriptions en la matière ;
  • renforcée : toute publicité doit désormais permettre raisonnablement de comprendre les risques afférents à l’investissement. Comme précédemment, elle doit comporter une mention indiquant que le non-respect des engagements de location entraîne la perte du bénéfice des incitations fiscales. La mention doit être dans le corps principal du texte publicitaire et dans une police de taille au moins égale à celle utilisée pour décrire les caractéristiques de l’investissement.

(*) Les investissements dits "Girardin" en outre-mer ne sont plus visés.

Surendettement des particuliers  (art. 66 / Code de la consommation : L.731-1, L.732-1, L.732-3, L.732-4) 

Continuant son action en faveur d’une plus grande efficacité des procédures de traitement du surendettement des particuliers, le législateur autorise la commission de surendettement à imposer des mesures aux parties sans passer préalablement par une phase de négociation amiable dès lors que le débiteur n’est pas propriétaire d’un bien immobilier (Code de la consommation : L.732-1). 

Par ailleurs, il est prévu que le silence gardé par les créanciers sur la proposition du plan conventionnel de redressement élaboré par la commission vaut accord à l’issue d’un certain délai qui sera déterminé par décret (Code de la consommation : L.732-3). 

Ces dispositions s’appliqueront à compter du 1er janvier 2018, concomitamment avec les dispositions de la loi de modernisation de la justice du XXIème siècle supprimant l’homologation judiciaire décisions de la commission de surendettement (rétablissement personnel sans liquidation judiciaire). 

Une clarification de terminologie d’application immédiate est apportée dans l’intitulé du chapitre 1er et dans l’article L.731-1 du code de la consommation : la notion de "capacité de remboursement" est remplacée par les termes "montant des remboursements". En effet, le chapitre premier comme l’article L.731-1 traitent de la détermination du montant des remboursements qui sont fixés notamment en application des règles de la quotité saisissable du salaire.

La procédure de déclassement anticipé étendu aux biens des collectivités locales (art. 35 / Code général de la propriété publique : L.2141-2)

En matière de domanialité, le Code général de la propriété des personnes publiques prévoit que le déclassement d’un bien du domaine affecté à un service public peut être prononcé dès que sa désaffection a été décidée alors même que les nécessités du service public justifient que cette désaffectation ne prenne effet que dans un délai fixé par l’acte de déclassement (CGPP : L.2141-1).

La règle qui ne concernait jusqu’alors l’État et ses établissements publics est étendue aux collectivités territoriales, aux groupements de collectivités et aux établissements publics locaux.

En outre, pour les transactions portant sur les biens concernés par cette procédure, le dispositif prévoit que :

  • toute cession du bien concerné doit donner lieu, sur la base d’une étude d’impact pluriannuelle tenant compte de l’aléa, à une délibération motivée de la collectivité locale auquel appartient le bien cédé ;
  • l’acte de vente doit, à peine de nullité, comporter une clause organisant les conséquences de la résolution de la vente. Les montants des pénalités prévues dans la clause résolutoire doivent faire l’objet d’une provision.

L’ordonnance du 20 avril 2017 relative à la propriété des personnes publiques, prise sur le fondement de l’article 34 de la loi Sapin 2, précise les modalités d’extension aux communes de la procédure de déclassement (art. 9 à 12). Elle comporte également des dispositions sur l’occupation et l’utilisation privatives du domaine public (art. 2 à 8).

Autre mesure

Le livret de développement durable devient le livret de développement durable et solidaire (art. 80).

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